Sowat (Mathieu Kendrick) est d’origine franco américaine.
Né en 1978 à Marseille, il grandit entre la cité Phocéenne et la Californie où il rend régulièrement visite à sa famille américaine. Adolescent, il s’initie à l’écriture de scénarios, de jeux de rôle et de bandes dessinées avant de découvrir le graffiti sur les murs du quartier de la Corderie et sur les parois du skatepark de la plage du Prado, via notamment les peintures de Desyst, Cam, Tower, Abel, Seek et Mosk.
En 1995, après avoir forgé ses premières classes le long de la voie ferrée près de son lycée, il fonde avec, entre autres, Obelix, Hep!, Tomsk, Souze et Achile, le crew des 3BDC. Autodidacte, ses premières peintures sont composées de lettrages d’inspiration classique new-yorkaise et de fresques collectives improvisées.
Pendant 3 ans, il part étudier les sciences politiques à l’IEP de Lyon, avant de s’envoler pour un an aux États-Unis en 2000 et d’entamer une première carrière de scénariste.
À son retour à Marseille en 2001, il reprend activement la peinture, notamment via ses rencontres avec les crews H20, PM et AAA. En 2002, il cosigne avec Gris1 La France d’en bas (Éditions Alternatives), livre dédié au graffiti dans le sud de la France qui lui permet d’échanger avec les artistes majeur-e-s des scènes Marseillaises, Montpelliéraines, Toulousaines et des villes environnantes.
La même année, il cofonde avec ses amis d’enfance l’association Artmada avec laquelle ils produisent des grandes fresques, dont plusieurs au stade Vélodrome ou au cours Julien, et organisent deux éditions du festival Graffiti Baletti (2002 et 2003).
Sowat s’installe à Paris en 2005, poursuivant pendant quelques années une carrière de scénariste dans le jeux vidéo (Atari, Ubisoft), puis dans le dessin animé (Method Animation). Sur son temps libre, il continue de peindre les murs des zones industrielles près desquelles il travaille.
En 2008, sa pratique évolue. Influencé par les travaux de CheyN (VDP, C4) et Hassan Massoudy, il se détache de l’outil aérosol pour s’initier à la calligraphie à l’aide d’un « ColaPen » (outil créé à partir d’une canette en aluminium pliée, de ruban adhésif et d’une tige en bois). Il s’entraîne avec cette plume artisanale et commence à forger son propre style. S’affranchissant progressivement des normes de la calligraphie traditionnelle, il puise son inspiration dans ses multiples références, passant du Cholo writing de Chaz Borjoquez vu à Los Angeles adolescent, jusqu’aux inscriptions vernaculaires latines et les alphabets cunéiformes observés lors de ses voyages et dans les collections des musées nationaux.
À cette même période, Bom.K l’invite à intégrer le collectif Da Mental Vaporz (DMV), entouré d’Iso, Kan, Jaw, Brusk, Dran, Gris1 (puis plus tard Blo et Lek). Immergés dans la culture de l’exploration urbaine, ils peignent dans de nombreuses friches de la banlieue parisienne et dans leur atelier de Juvisy, avant de partir à l’assaut du globe. Ensemble, ils voyagent à travers l’Europe et le monde, en réponse aux invitations à réaliser des fresques monumentales (Londres, Copenhague), des installations in situ (Toulouse, Angers) ou des expositions immersives (Berlin, Melbourne).
En parallèle de ces expéditions internationales, Sowat réalise, avec l’aide de Kan, le clip _Hard Twelve du rappeur Beat Assailant, dans lequel on aperçoit plusieurs peintures du collectif. Adepte des throw ups à l’extérieur, l’artiste développe à l’intérieur des bâtiments en ruine qu’il sillonne une écriture en tracé direct, peinte à la patte de lapin. La répétition des lignes et symboles qu’il trace le plonge dans un état méditatif, accentué par la gestuelle automatique de l’écriture. Cette introspection fait ressortir, inconsciemment ou non, des formes archétypes récurrentes dans ses œuvres - croix, points, flèches ou étoiles - qu’il interprète comme « une grammaire du graffiti ». Stimulé par l’émulation des autres membres du groupe, il réalise avec les DMV son premier film en stop motion lors du grand mur, Exquisite corpse_, pour le festival Supremassy en 2010.
Cette même année, il se détourne définitivement de l’écriture de scénarios pour se consacrer exclusivement à la peinture. Sa rencontre avec l’artiste Lek lors de l'exposition Graffiti Art Annual Summer Show à la galerie Celal à Paris marque un tournant dans leurs carrières respectives, jusqu’à aboutir à la création du duo _Lek & Sowat _en 2012 à l'issue de l'aventure Mausolée. Ensemble, ils réalisent des projets d'envergure, collectifs ou non, remarqués par leurs pairs mais aussi par les institutions les plus prestigieuses, du Palais de Tokyo à la Villa Médicis, en passant par le Centre Georges Pompidou. Ils développent également une pratique à l’international (Inde, Asie, Émirats arabes unis, Amérique latine, etc) et de multiples collaborations avec des artistes de divers horizons : graffeurs (Futura, Mode2, Jonone), stylistes (Agnès b., Jean-Charles de Castelbajac), poète (John Giorno), plasticien (Jacques Villeglé), pour n’en citer que quelques uns.
En atelier, Sowat poursuit son travail de recherches plastiques. Sa première exposition personnelle est présentée en 2015 à la RLF Gallery à Genève, puis il intègre la galerie Le Feuvre & Roze à Paris qui lui propose quatre « solo shows » (en 2016, 2019, 2021 et 2024). En janvier 2024, il participe à l’exposition _Sans Sentense auprès d’artistes indiens et internationaux, organisée par la Gallery XXL lors de l’ouverture de leur nouvel espace à Mumbai.
Sur toile, son travail expérimental mélange encres, eau et autres solvants. Sowat cherche à maîtriser les propriétés et réactions chimiques de ces liquides, en les provoquant, les contenant ou les amplifiant. Peignant désormais à l’horizontal, il compose avec une grande part d’aléatoire, au hasard de la superposition ou de la stagnation des gouttes. L’atelier est son laboratoire dans lequel il expérimente comme un alchimiste la Mécanique des Fluides, _pour reprendre le titre de son exposition personnelle à la galerie Le Feuvre & Roze (2019).
Source : Thomazine Zoler 2024